Une imitation qui interroge

De l’économie numérique à l’intelligence artificielle, le Cameroun semble suivre, parfois aveuglément, le rythme imposé par les grandes puissances technologiques.
À chaque nouveau concept venu d’Europe ou des États-Unis blockchain, metaverse, IA, cloud computing, le pays s’empresse d’en adopter les termes, souvent sans en maîtriser les fondements ni l’utilité locale.

Mais à force de courir derrière les tendances mondiales, le Cameroun ne passe-t-il pas à côté d’une innovation réellement adaptée à sa propre réalité économique et sociale ?

Une économie numérique sans colonne vertébrale

Depuis une dizaine d’années, le discours sur la “transformation digitale” s’impose dans toutes les sphères : conférences, plans gouvernementaux, incubateurs.
Pourtant, sur le terrain, les résultats restent timides.

Les infrastructures numériques sont encore incomplètes, les procédures administratives restent largement manuelles, et la majorité des PME ne disposent d’aucun outil de gestion numérique.
Dans ce contexte, parler d’économie numérique semble prématuré.

Un chercheur en innovation basé à Yaoundé résume :

“Nous avons adopté les mots avant les actes. Nous avons importé les concepts sans construire les fondations.”

Le marketing digital, un saut sans transition

L’arrivée du marketing digital a accentué le paradoxe.
Avant même que les bases de l’économie numérique ne soient établies, le Cameroun s’est engouffré dans la mode du “digital marketing”.
Des milliers de jeunes se sont formés à la gestion des pages Facebook, à la création de visuels et à la publicité en ligne.

Mais faute d’un tissu économique numérique solide, ces compétences se sont développées dans le vide :
les entreprises locales n’étaient pas prêtes, les clients ne comprenaient pas les enjeux, et les formateurs eux-mêmes manquaient souvent de cadre méthodologique.

Résultat : une explosion de formations superficielles, une dévalorisation du métier, et un profond désalignement entre savoir-faire et besoins réels.

L’IA, dernier symbole d’une fuite en avant

Aujourd’hui, le même scénario se répète avec l’intelligence artificielle.
Des conférences fleurissent, les influenceurs en parlent, les institutions s’y intéressent.
Mais dans les faits, peu d’entreprises disposent des infrastructures de données ou des compétences techniques nécessaires pour l’exploiter.

L’IA est devenue une “mode” plus qu’un moteur de transformation.
On parle d’automatisation et de productivité, mais dans un pays où la majorité des entreprises ne disposent même pas de site web fonctionnel, la priorité devrait peut-être être ailleurs : structurer avant de sophistiquer.

Pourquoi copier ne suffit plus

Imiter les modèles occidentaux peut sembler pragmatique.
Après tout, ces pays ont déjà balisé la voie technologique.
Mais copier sans adapter conduit à l’échec, car le contexte camerounais diffère profondément : infrastructures, pouvoir d’achat, besoins des entreprises, culture de gestion.

Une stratégie numérique durable doit partir du terrain.
Elle doit poser des questions simples :

• Quels sont les besoins réels des PME locales ?
• Quels outils numériques peuvent améliorer la vie quotidienne des citoyens ?
• Comment adapter la technologie à la réalité africaine plutôt que l’inverse ?

C’est ce que beaucoup appellent désormais “l’innovation contextuelle” une approche qui part des usages, et non des tendances.

Créer un modèle camerounais du numérique

Le Cameroun dispose pourtant d’un atout considérable : une jeunesse créative, connectée, curieuse et pleine d’initiatives.
Mais cette énergie reste dispersée.
Il manque une vision nationale cohérente, capable de relier les start-ups, les écoles, les institutions publiques et le secteur privé autour d’un même objectif : faire du numérique un levier de développement endogène.

Des entreprises comme Netvoryx plaident pour cette approche.
Elles défendent un modèle où la technologie est avant tout un outil de souveraineté et de valeur ajoutée locale :
développer des solutions pour les réalités africaines, pas seulement pour suivre la tendance mondiale.

Le numérique doit servir, pas séduire

Le véritable défi du Cameroun n’est pas d’être “à la mode”, mais d’être efficace.
L’avenir du digital africain repose sur une idée simple :

“Une technologie qui ne résout pas un problème local n’est qu’un gadget.”

Plutôt que de chercher à reproduire les modèles de la Silicon Valley, il est temps de bâtir des écosystèmes numériques ancrés dans les besoins réels du continent.
Des plateformes de gestion locale, des outils pour les agriculteurs, des services digitaux pour la santé ou l’éducation voilà ce que pourrait être le vrai numérique camerounais.Conclusion : copier n’est pas innover

Le Cameroun n’a pas besoin d’être le “suiveur” du monde numérique, mais son interprète.
L’enjeu n’est pas de rattraper le Nord, mais de réinventer le Sud, avec ses propres priorités, ses propres solutions et ses propres talents.

Adopter la technologie, oui mais à condition de la comprendre, la contextualiser et la maîtriser.
Car dans le numérique comme ailleurs, l’imitation sans stratégie mène à la dépendance.

Par Netvoryx
Agence de stratégie digitale et technologique basée à Yaoundé. Nous croyons en un numérique camerounais, intelligent, responsable et adapté à nos réalités.